Camping, tiny-house, cabanes… Comment la crise du logement a poussé les Français à inventer de nouvelles façons d’habiter ?

Pour faire face à la crise du logement et à la pénurie locative, certains Français sont contraints de réinventer des façons d’habiter. Vivre dans un camping à l’année, dans des tiny-houses ou encore des hameaux légers, sobres énergétiquement… Nous sommes allés à la rencontre de ces Français qui ne peuvent plus se loger de façon conventionnelle.
Elle est à l'origine d’un village de tiny-houses né il y a maintenant 6 ans.
Elle, c’est Aurélie Moy, fondatrice du Ty Village, un village constitué d'une vingtaine de tiny-houses et situé à Saint-Brieuc, sur les côtes bretonnes.
Aurélie fait partie du million de Français qui a fait le choix de l’habitat léger. Tiny-houses, cabanes, roulottes, tipis… L’habitat léger, encadré depuis un décret du 27 avril 2015, est défini juridiquement comme “des résidences démontables constituant l’habitat permanent de leurs utilisateurs”.
Et le phénomène prend de plus en plus d’ampleur. En cause : la crise du logement qui ne permet plus aux Français d’acheter aussi facilement qu’avant.
Aurélie Moy commente :
“Quand j’étais en école d’ingénieur, je me suis rendue compte que je ne souhaitais pas emprunter et m’endetter pour les 25 prochaines années. J’ai réfléchi à la façon dont je m’imaginais habiter et très vite, la tiny-house s’est imposée à moi. C’est une maison mobile qui permet à la fois de jouir d’une indépendance financière et géographique”
Une crise du logement qui frappe de plein fouet la France
Des taux d’intérêt en plein boom, des crédits de plus en plus refusés par les banques et un effondrement de la construction… Il n’en fallait pas plus pour que le logement implose en France.
Qualifiée de véritable “bombe sociale” par la Fondation pour le Logement des Défavorisés (ex Abbé Pierre), la crise du logement fait rage et touche de plus en plus de personnes en France. Le dernier rapport de la Fondation tire la sonnette d’alarme : 330 000 personnes sont aujourd’hui SDF en France et 15 millions de personnes sont touchées par la crise du logement.
En cause notamment : un accès à la propriété rendu de plus en plus difficile. Avec des taux d’intérêt qui ont explosé, le volume des crédits accordés a baissé de 40% en un an. Ainsi, les primo-accédants potentiels sont donc finalement restés locataires… entraînant une surcharge de la demande locative.
Une situation telle que certains Français se retrouvent aujourd’hui dans l’impossibilité totale de se loger. Pour pallier cette situation, ils sont de plus en plus nombreux à réinventer de nouvelles façons d’habiter, comme Aurélie Moy, qui a décidé de contourner la difficulté d’emprunter en achetant une tiny-house clé en main pour 60 000€.
Nées aux Etats-Unis en 1929, les tiny-houses ont conquis de plus en plus la population et constituent aujourd’hui une vraie réponse à la crise du logement. En France, ces mini-maisons qui roulent se sont notamment développées au moment du confinement :
- En 2023, plus de 1 000 tiny-houses ont été construites, soit une multiplication par 4 en deux ans ;
- En 2024, plus de 150 entreprises se consacrent à la construction de ces petites maisons sur roues, soit une augmentation de 40% par rapport en 2023.
Une tendance qui conquit d’ailleurs toute l’Europe, à l’image de l’Allemagne qui aménage des containers en lofts pour loger des étudiants ou des jeunes couples.
Outre l’aspect économique, les tiny-houses prônent un mode de vie plus écologique, avec des matériaux de construction plus responsables que les maisons traditionnelles, mais aussi l’idée de se débarrasser de choses matérielles pour faire de la place aux choses qui comptent vraiment.
Aurélie Moy raconte :
“Une tiny-house, c’est 2m de large et 6m de long en moyenne, il est donc nécessaire d’optimiser l’espace et de réfléchir à ses besoins fondamentaux pour aménager sa maison. Construire une tiny-house, c’est donc avant tout faire un travail d’introspection.”
Vivre plus sobrement, une réponse à la crise ?
Mais vivre dans une tiny-house n’est pas la seule alternative au logement traditionnel. D’autres Français ont décidé de se tourner vers des yourtes, des colivings ou encore des colocations intergénérationnelles.
Ces phénomènes ont tous un point commun : rechercher davantage de sens et de lien social dans une société perçue comme toujours plus individualiste.
Mais outre l’aspect social, derrière ces mini maisons qui s’immiscent sur nos feeds Pinterest, se cache en réalité une crise économique majeure : celle de l’impossibilité à trouver un logement. Et malgré la réponse que peut apporter ce qu’on appelle l’habitat léger, cela ne sera pas suffisant pour résoudre la crise du logement.